Aventuriers des mers, de l’Institut du monde arabe au Mucem
Après son succès à l’Institut du monde arabe à Paris, l’exposition « Aventuriers des mers » avec Sisygambis continue son voyage à Marseille au MuCEM (Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée). Tandis que l’IMA centrait son propos sur les intenses relations entre les Arabes et la mer, le MuCEM, lui, met l’accent sur la très ancienne histoire des échanges entre la Méditerranée et l’océan Indien. C’est là, entre ces deux zones géographiques aux extrêmes l’une de l’autre, que se sont déroulées les grandes aventures maritimes fondatrices du temps présent. Au plaisir de vous y rencontrer !
Un avant goût ici des pièces présentées à cette occasion :
Comores, le chant de la mer
L’anthropologue Damir Ben Ali dévoile les replis de la langue comorienne.Le nom même de « Comores » viendrait des Arabes qui vivaient au Mozambique et initièrent une large migration africaine vers ces îles. Langue arabo-bantoue donc, mais avec des apports Austronésiens – c’est dire si les allées et venues sur l’océan allèrent loin trouver des sources civilisatrices. Sisygambis, en revanche, tourne au plus près des gestes et des attitudes : la fierté des femmes au masque d’argile, étonnamment coiffées de fruits ; l’agilité des doigts musiciens ou artisanaux ; et surtout, toutes les activités marines qui rythment le jour, du bain des enfants à la fabrication des galawas, du transport des poissons pour la vente au marché jusqu’au débarquement régulier des ferries et aux palabres du port… Ainsi les images du film font-elles écho à la voix du musicien qui égrène l’incessant chant de la mer.
Zanzibar, au carrefour du monde
Sur les images d’une incessante activité quotidienne, au son des musiciens de DCMA Zanzibar, Abdul Sheriff (directeur de l’Institut de Recherches sur l’océan Indien), pointe l’importance et la singularité de Zanzibar : cette petite île de l’océan Indien fut, au cours des siècles, un lieu stratégique de migrations, de liens et de métissages entre les Comores et l’Afrique, l’Arabie, le Golfe persique et l’Inde. Ces liens et ce brassage ont façonné, pour un peuple très diversifié, une civilisation originale, où les échanges du commerce prirent le pas sur les différences religieuses. L’esclavage même y généra un modèle singulier, moins déterministe, où certains esclaves pouvaient, par filiation arabe par exemple, naître libres. Et aujourd’hui encore, la couleur de peau n’assigne pas chacun à une seule origine. Tout, à Zanzibar, renvoie à la pluralité d’une histoire à facettes, complexe, vivante : les couleurs de la peau, des tissus, des végétaux, et ces autres couleurs que sont les gestes efficaces, les postures parfaites, le balancement de la marche…
Prendre la mer
… et no comment ! Juste du son et de l’image. Quitter les terres du langage pour s’immerger dans l’océan Indien. Aller dans l’allant du bateau, toute quille à la mer, fendre le monochrome turquoise et la vague lancinante, claquer avec les voiles et jaillir avec les dauphins, se croire enfant de haute mer… Puis approcher l’île comme on découvre un continent, longer la côte à bas bruit, gagner doucement l’étal du lagon, l’envol d’oiseaux en nuage commun, éventail d’ailes noires et blanches… Glisser dans la paix des mangroves, la paix des eaux plates sous les branches – la paix, oui, comme un possible repos à l’approche de ces terres où explorateurs et migrants veulent aborder, toujours.
Tempête
Où quand la mer enrage, blanche et noire de fureur, mur de vagues et mur de sons, énorme roulis d’eau et de tonnerre… Sur des images de Yann Arthus-Bertrand, Sisygambis compose la musique de la violence océanique.
textes de Christine Rodès
Christine Coulange : réalisation, création sonore
Gérard Galian & Nchan Manoyan : image
Philippe Musso : montage
Hervé Rico : mixage
Mahsin Ally Basalama, Mohamed Issa Matona, Kheri Kombo (DCMA Zanzibar), Mmadi Djibaba (Comores) : musique
Claire le Chevalier : traduction
Du 7 juin au 9 octobre 2017